Quand les médecins lancent l’alerte : résistances face à un système en dérive
- Ariane Plaisance
- 10 mai
- 2 min de lecture
Dernière mise à jour : 22 mai

De la commission Rochon en 1985 à la réforme Dubé (2024) en passant par les réformes Couillard (2003) et Barrette (2015) le système de santé et de services sociaux du Québec a subi une série de réformes structurelles justifiées par des promesses d’efficacité, de simplification et de modernisation. Ces réorganisations de plus en plus organisées en vase clos ont progressivement transformé le système à l’origine public et communautaire en un système bureaucratisé, opaque et fragmenté… et privé. Ces réformes ont contribué à épuiser les professionnels, à affaiblir les soins de première ligne et à creuser les inégalités d’accès et à centraliser les soins et le pouvoir autour de l’hôpital.
Cette évolution ne peut être comprise sans nommer l’idéologie qui l’anime : le néolibéralisme. Cette idéologie valorise la privatisation, la performance, la responsabilisation individuelle et la réduction du rôle de l’État. En santé, cela se traduit par une logique comptable des soins, un affaiblissement des services publics, et une tendance à blâmer les individus pour leur état de santé et les médecins pour leur performance plutôt que de s’attaquer aux déterminants sociaux de la santé (logement, revenu, alimentation, environnement, éducation) et filet social.
La santé devient une responsabilité privée et individuelle et non un droit garanti par des institutions solides et équitables. Tout comme le choix de mourir devient un choix individuel…
Dans ce contexte, certaines voix s’élèvent. Des médecins et d’autres soignants choisissent de briser l’omerta pour dénoncer les effets délétères des réformes, le manque de personnel, les conditions de travail indignes ou les décisions administratives qui nuisent directement à la qualité des soins.
Ces lanceurs d’alerte prennent de grands risques : marginalisation, blâme professionnel, doctor bashing, intimidation. Pourtant, leur rôle est essentiel. Ils incarnent une éthique de la vigilance et de la responsabilité qui refuse de banaliser l’inacceptable.
Il s’agit d’un acte profondément moral : il naît lorsque l’on constate que les canaux de signalement sont ignorés. Ces voix dissonantes dérangent le politique. Mais elles sont aussi porteuses d’espoir : elles rappellent qu’il est encore possible de défendre une vision de la santé centrée sur la dignité, la justice et la communauté.






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